mardi 21 octobre 2008

La qasida classique





Permanence d’une forme

La poésie arabe est dominée par la forme qasida née dans le désert d’Arabie au sein de tribus nomades. Devenue citadine, la société musulmane a maintenu cet héritage en l’état pendant de longs siècles.
Si les poètes des cités omeyyade ou abbasside abandonnent assez vite les thèmes liés à l’errance bédouine, c’est d’abord parce que les auteurs du IIIème/IXème siècle vivent dans un nouvel environnement tant géographique que social. Ils n’éprouvent plus la nécessité de recourir à un langage qui a été forgé pour exprimer des relations sociales et une nature qu’ils ne connaissent plus concrètement.
Les contemporains d’Abu Nuwas, à l’époque de Harun al-Rachid ont besoin de commentaires pour comprendre le sens des “Mu’allaqat”. Pour saisir toutes les nuances qui faisaient la richesse et l’originalité des descriptions du désert, des éléments naturels et de la faune qui se trouvent dans les poèmes d’un Labid, Chanfara ou Imru’ al-Qays, il fallait désormais recourir à des “dictionnaires”.
Par contre, sur le plan structural, rien ne changera fondamentalement avant le mouvement de rénovation poétique qu’a connu al-Andalus à la fin du Xème siècle lors de l’émergence de ce qu’on appellera le “muwashshah”.

Les contraintes

Le poète entretient avec le monde invisible un rapport particulier. Il est un réceptacle privilégié de puissances et de pouvoirs magiques. Il en retire des impressions, des sensations et une vision souvent proches du fantastique. C’est en ceci que le poète est un “habitant d’une autre planète. Ses mots empruntent au langage commun une enveloppe qui recouvre désormais de nouvelles significations. Aucun dictionnaire ne donnera le sens d’un poème.
Mais aussi inspiré soit il, le poète est toujours contraint de s’exprimer dans un cadre formel indépendant de son choix. Il doit se plier presque toujours à une structure définie avec rigueur par ses prédécesseurs.
Ainsi la qasida est construite selon une succession de vers (bayt pl. abyat) composés chacun de deux hémistiches (shatr pl. ashtar). Le bayt s’achève par une rime (qafiya pl. qawafi) et il est construit sur un mètre (bahr pl. buhur) qui reste le même tout le long du poème.
Du point de vue rythmique, chaque bayt est une unité respiratoire qui ne peut excéder un certain volume. Son étalement est fonction des capacités respiratoires humaines. A l’origine, le poème est composé en vue d’être déclamé en public par un rhapsode (rawi pl. ruwat) qui seconde souvent le créateur du poème dans cette tâche.
Sur le plan sémantique, la tradition consiste à donner à chaque bayt une autonomie. Chaque vers doit se suffire à lui même et porter un sens complet même s’il participe avec ce qui le précède et/ou le suit à une signification plus large.
Ainsi, le vers apparaît comme étant une entité signifiante tributaire du souffle par son mètre et lié au flux sanguin et au battement du coeur par son rythme (wazn pl. awzan).

Structure de la qasida
La structure de la qasida est binaire. Chaque vers comporte deux hémistiches où s’expriment :
- des idées complémentaires ;
- des idées opposées ou antithétiques ;
- des idées proches ou parallèles.
Quant à la complémentarité, elle permet de lier la cause à la conséquence, le thème au prédicat, l’action au lieu où elle se déroule ou à celui qui l’accomplit.

Aucun commentaire: