

La cortezia apparaît d’une certaine manière
comme l’équivalent chrétien de l’adab.
Indissociable de la mezura (évoquée
plus haut), ce concept désigne le comportement social des gens aisés et
« civilisés », qui ont reçu une éducation raffinée. Ceux qui
pratiquent la cortezia cultivent un
goût certain pour les arts, la poésie, la connaissance et les bonnes
manières. Notons que la Dame décrite
dans les poèmes des troubadours apparaît tout à fait conforme à l’attitude
courtoise. Son comportement est celui d’un être raffiné et éduqué. Sa
conversation est agréable, ses mouvements sont grâcieux et sa générosité est
immense. Son visage affiche une expression gaie et accueillante. Ses propos
sont mesurés et ses manières distinguées. D’ailleurs, il est intéressant de
constater que ses vertus courtoises sont souvent abordées avec plus
d’insistance que ses qualités physiques.
Ainsi, l’art de la « maîtrise de soi » cultivé au Moyen Âge en Orient et en Occident musulman puis en Occident chrétien, trouve son origine à la fois dans les valeurs véhiculées par les religions monothéïstes (l’Islam d’un côté et le Christianisme de l’autre), et dans les codes sociaux établis par les classes les plus aisées. Le milieu aulique est donc le lieu où s’élabore une culture particulière, qui rejaillit peu à peu en dehors de l’enceinte des palais et des châteaux à mesure que la vie citadine se développe et fait naître des catégories sociales intermédiaires, lesquelles s’inspirent des comportements de l’élite.
Clélia Bergerot, « L’art d’aimer selon les poètes arabes d’al-Andalus et les troubadours occitans», Mémoire de Master 2, Université Sorbonne Paris 3, Juin 2015
[1] Pour le concept d’Adab, extrait du mémoire de Master 1
intitulé « Rencontre, séparation et retrouvailles dans la poésie chantée
arabo-andalouse » (avec quelques modifications).
[3] Concernant l’élaboration du ghazal, on distingue généralement deux mouvements
parallèles. L’un, que l’on situe habituellement dans un contexte bédouin, est
celui qui a vu naître la poésie dite ‘udhrîte.
Quant à l’autre, qui peut être qualifié de citadin, semble avoir pris naissance
dans la région du Hidjâz.
Ce dernier a connu un développement considérable, au sein d’une société
particulièrement raffinée. Le poète le plus représentatif de ce ghazal « hidjâzien »
est sans conteste ‘Umar Ibn ‘Abî Rabî’a, qui est en outre considéré dans
l’imaginaire collectif, comme un « Don Juan arabe ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire