lundi 13 avril 2009

les qaçaïd culte d'El Ferda


Ce sont celles qui sont chantées dans toutes les représentations de la Ferda. Outre « Ya Krim … », nous citerons « Zahou Ed Dounia ».

Du genre tawassoul, « Ya krim … » qui ouvre toutes les soirées de la Ferda a été écrite par Sidi Kaddour El Alami, grand juriste marocain du XIXème siècle. Ce poème est une invocation de la clémence de Dieu usant de fortes métaphores empruntées à la poésie arabe classique et au riche patrimoine populaire. Toutes les qualités et tous les noms de Dieu sont cités. Elle est d’une spiritualité telle qu’à Kénadsa, il n’y a pas un taleb qui ne se fait un point d’honneur de la connaître par cœur.

« Ya Krim El Kourama », connue dans le chaabi sous le nom « El Ferradjia », a une relation particulière avec Kénadsa. On dit qu’après avoir terminé de l’écrire, Sidi Kaddour El Alami l’aurait envoyée à Sidi Mébarek, alors cheikh de la zaouïa Ziania. Il était de tradition que les poètes soumettent aux hommes saints et aux cheikhs les qaçaïd où Dieu et Son prophète sont évoqués. Les saints apportent les correctifs éventuels relatifs à la dimension religieuse de la qacida. C’est dans ce but que Sidi Kaddour El Alami a envoyé son poème à Sidi Mébarek, poète par ailleurs, qui l’a prolongé par le « zerb » « Ya L’Bassir » connu depuis par les seuls Kénadsiens et introuvable dans les versions chaabi et melhoun de « Ya Krim El Kourama ».

Précisons que le « zerb », littéralement clôture » a une double signification ; littéraire d’abord quand il s’agit des qaçaïd religieuses où il préserve la qacida des altérations qui pourraient la toucher ; musicale lorsqu’il qualifie l’avant dernière phase de la qacida interprétée dans un rythme rapide.

Voici maintenant la traduction d’une partie de « Ya Krim El Kourama »


O Toi le plus Généreux des généreux, apporte – nous le soulagement,

Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi,


Nul autre dieu que Toi n’est Proche, Indulgent et Omniprésent,

C’est Toi le Bienveillant, le Juste, l’Adoré

Si, à l’unisson, tous Tes sujets exprimaient des vœux,

Avec équité et à l’instant, Ta bonté les exaucera

Tel le feu du flambeau allumant la mèche de la bougie.

Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi.

Trouvera le salut et sera préservé celui qui cherche refuge chez Toi,

O Seigneur, c’est Toi qui donne et c’est Toi qui reprend,

Ce n’est que par négligence que moi ton serviteur je suis dans le péché,

Mais je sais que Ta large bonté est éternelle,

Que le voile de ta lueur couvre misérable et bienheureux,

Que celui dont la prière est entendue se rapproche de Ta fortune et échappe au besoin.

Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi.


Si tous les êtres, arabes et étrangers,

Hommes, djinns et anges s’entendaient,

Ils ne délivreraient personne de Ta sentence

Et ne priveraient personne de Ta bonté et de Ton agrément.

Dans tout l’univers, les hommes et les choses

Ne perçoivent que Ton trône flamboyant et tenace.

Ta récompense atteindra le fidèle,

Alors, garnis mon âme comme Tu as embellis la nuit par les astres.

Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi.


Celui que Tu assistes et que Tu guides ne verras plus le mal

Par ceux qui savent, Prends ma main,

Réponds à ma prière, Seigneur,

Soulage l’angoisse de ma solitude, Tu es mon seul soutien,

Nul philosophe ou souverain, nul tribun ou sage ne peut le faire,

Nul vizir et nul brave,

Sauf Toi, très Puissant, Toi la source de toute fierté.


Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi.

Tu es au courrant de tout ce que je cache,

Tu connais les secrets de mon cœur,

Alors, Seigneur, Pardonne mes péchés.

Qui épargne et aide les faibles comme moi,

Qui les sort de leur misère,

Sauf Toi, Seigneur, qui as sauvé Ibrahim des flammes.

Jamais ne sera déçu celui qui croit en toi.


ÉCOUTER : http://www.deezer.com/track/krim-el-kourama-T312718

Pour son importance particulière, nous donnons la traduction du texte intégral du zerb « Ya L’bacir », écrit par Sidi Mébarek pour « Ya Krim El Kourama » :


O Toi le Clairvoyant, le Bon, le Généreux,

Toi l’Unique, Toi qui entends mes prières,

Par Mohammed, par ses adeptes et par ses épouses,

Satisfais mes besoins.

Par « En Noun » et par « El Aïn »,

Mon cœur est plus propre que le verre

Comme tous les cœurs, il est entre tes mains,

Sauve moi comme tu as sauvé Younès des vagues déchaînées.

Je T’appelle Seigneur, mon espoir est en toi.

Mon désir est d’être à Arafat avec les pèlerins,

Exauce ce vœu par Ta grâce.

Que je rende visite au souverain bien-aimé,

Seigneur, ne déçois pas mon espoir en toi.

Que je sois, au paradis, élevé à ses côtés,

Qu’il me souhaite la bienvenue.

Celui qui aime Taha ne craint rien,

Ici bas et dans l’au-delà.

O Toi que les yeux ne peuvent voir,

Par ceux qui font Ton éloge,

Facilite ma vie.


Une deuxième qacida culte, d’un auteur inconnu, très appréciée traite des plaisirs de la vie que sont le savoir, l’équitation, la fortune, les femmes, les vêtements et le vin. Avec des mots simples l’auteur fait l’éloge de ce qui de nos jours encore représente pour beaucoup la seule raison d’être. Cette qacida s’appelle « Zahoue Ed dounia » (les plaisirs de la vie). D’abord, les livres, symbole du savoir, sont cités ;


Les livres sont le plaisir de sages amoureux

Qui lisent le Livre de Dieu

Le connaissent par cœur

Et savent le préserver.

Même la nuit, dans des écoles,

A la seule lueur des étoiles, ils apprennent.

Soyons sous la protection des gens des livres et des planches.

Les plaisirs cde la vie sont les livres, l’équitation,

La fortune, les femmes, les vêtements et le vin.

Les plaisirs divins sont dans la fortune,

Elle procure tous les agréments

Les grands notables savent la garder,

Les commerçants l’adorent.

C’est avec l’argent que les célébrations se font.

C’est les joyaux, le saphir, le chrysolite et l’or

Qui nous élèvent au niveau des anges.

Les plaisirs cde la vie sont les livres, l’équitation,

La fortune, les femmes, les vêtements et le vin.

Viens voir le plaisir des chevaux

Le jour des courses,

Côte à côte, des jeunes à cheval

Cavaliers plein d’assurance

Aucun lâche dans leurs rangs

Elégamment habillés

Et les filles chantant ‘Aroubi vertueux.

Les plaisirs cde la vie sont les livres, l’équitation,

La fortune, les femmes, les vêtements et le vin.

Les femmes font la joie des amoureux

Qui dans des palais de marbre

Avec luth et violon

Récitent leurs poèmes.

Et telles des anges, au milieu des gens d’amour,

Les vierges chantent.

Les plaisirs cde la vie sont les livres, l’équitation,

La fortune, les femmes, les vêtements et le vin.

2. Les qaçaïd de Sidi Embarek : petit fils de Sidi M’Hamed Ben Bouziane, cheikh de la zaouïa entre 1859 et 1860, 11 mois – plus courte période dans la mashyakha de la zaouïa Ziania –, Sidi Embarek est un grand poète de Kénadsa. Nous le citons particulièrement parce qu’il est l’auteur de « Ya El Alem Ma F’Samim » l’une des qaçaïd favorite de Kénadsa mais également pour l’anecdote relative à sa vie poétique. En effet, de son vivant Sidi M’Hamed, qui fut aussi le parrain de Sidi Embark, avait interdit à ce dernier d’écrire des poèmes, sans doute pour l’amener à se préparer exclusivement à sa future fonction de cheikh. Ce fut en vain car Sidi Embarek, après une brève mashyakha, finira par s’exiler volontairement dans une ville du Maroc. Ne pouvant donc plus dire de la poésie, Sidi Embarek serait devenu muet. Les proches de Sidi M’Hamed ont alors sollicité son indulgence et lui ont demandé d’autoriser son petit fils à s’exprimer en vers. Ce qu’il fit. Et après un long silence, « Ya El Alem Ma F’Samim » est écrite. En voici la traduction de quelques extraits :


O Toi qui connais mon tréfonds,

Consent à être généreux avec moi,

Par le roi des bienfaisants,

Par ses épouses,

Par ses parents et par ses oncles.

Ma quiétude est perturbé

Et il n’y a que Toi

Le Clément pour m’apaiser.

Dans mon agonie, c’est seulement chez Toi que je me réfugie

Pour calmer ma douleur.

O Toi qui connais mon tréfonds.

Aide-moi à n’être plus dépendant,

Inspire moi le droit chemin,

Comme Tu es indulgent,

J’implore Ton pardon pour mon iniquité et mes crimes.

O Toi qui connais mon tréfonds.

Qu’ai-je à craindre alors que Toi Eternel

Tu connais les secrets de mon cœur.

Par la juste cause de Ton prophète,

Par les mystères de Ton Grand Nom,

Allège mes peines.

O Toi qui connais mon tréfonds.

Lors du châtiment des mécréants

Eloigne- moi des flammes de l’enfer,

Elève-moi, O Allah

Au paradis et aux grâces divines.

O Toi qui connais mon tréfonds.


Source: http://membres.lycos.fr/zaidihoucine/el_ferda.htm

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