vendredi 26 juillet 2019

Langue arabe et fiction: Hoda Barakat


“J’ai commencé à découvrir l’arabe après l’école, car l’enseignement de l’arabe ne le mettait pas en valeur. Il était répulsif : toutes les matières étaient enseignées en français et on faisait exprès de faire haïr cette langue, comme si ça ne valait pas le coup de l’étudier. En plus, passer du libanais parlé à l’arabe écrit était compliqué, il y avait des kilomètres, et il fallait voyager tout seul. […] Ce qui m’a fait aimer l’arabe, c’est un éveil, un déclic. Je me suis rendu compte au début des années 1970 que cette langue était magnifique, grâce à tout ce qui s’écrivait à cette époque. C’était l’époque de la nouvelle Nahda (Renaissance) avec des auteurs comme Youssef El-Khal ou Ounsi El-Hage. Je n’ai pas délaissé le français, j’ai juste pris conscience du fait que j’avais déjà une langue.”

 Le jury du Booker arabe l’a récompensée pour son roman Barid Al-layl, publié en 2017 chez l’éditeur beyrouthin Dar Al-Adab, et traduit l’année suivante chez Actes Sud sous le titre Courrier de nuit. “Dans ce roman épistolaire, l’écrivaine met en scène des marginaux, dont les lettres sont condamnées à n’être jamais lues par leur destinataire”, résumait l’an dernier L’Orient-Le Jour.

Dans Al-Hayat, la romancière revient sur la genèse de cet ouvrage : “Courrier de nuit est né d’images qui m’obsédaient, celles de réfugiés fuyant leur sort. Ces errants sur leurs rafiots de mort sont devenus pour le monde un groupe indésirable, un virus menaçant la civilisation. Je ne réclame pas que le monde occidental ouvre grand ses portes ou qu’il idéalise les réfugiés, je voulais leur donner une existence humaine, chose qu’on leur dénie souvent.”

“Mon lecteur est arabe”

Contactée par L’Orient-Le Jour après la remise du prix, Hoda Barakat a réagi en ces termes :

Je suis très heureuse parce que ce prix est important, il permet d’être visible partout dans le monde arabe, or je suis très loin de cette région, aussi bien physiquement que mentalement. […] Ça me fait vraiment plaisir que mon roman épistolaire soit récompensé, car mon lecteur est arabe, et j’écris en arabe.”

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