Lecture historique et texte sacré, le cas du Coran et
de ses exégèses.
Le Coran
Le temps de la
révélation :
Le début : 610
Période mecquoise 610-
622
-
615 :
expéditions en Abyssinie
-
619 : mort de deux
soutiens importants de Mohamed
-
622 : Hégire
Période médinoise : 622-632
-
Installation :
coexistence pacifique
-
Escarmouches : combats contre le Mekkois
-
Problèmes avec
les Ansar
-
Problèmes avec
les juifs
-
Problème avec les
tribus bédouines
-
Victoire sur les
Mekkois
-
Incertitude de
Hunayn
Évolution du statut de Mohamed :
mundhir, rassoul, nabiyy
Lieu de la révélation :
Hédjaz, Espace limité :
-
La cité de la
Mecque
-
L’oasis de Médine
Forme de la
conservation :
-
Orale
-
L’Écriture
problématique
Objet de croyances de
millions d’hommes répartis sur une immense partie de la planète, le Coran est avant
tout un texte sacré. Le musulman y puise une explication du monde, des règles
de comportement et des pratiques rituelles. Considéré par les musulmans comme
la dernière parole révélée par Dieu aux hommes, ceux-ci insistent sur sa
perfection. La seule attitude admise par le croyant aujourd’hui est celle qui
consiste à appliquer tout ce que le Coran recommande.
Mais le Coran ne nous est pas
parvenu seul. Il est accompagné de deux documents que le musulman est en
devoir de consulter : le hadith
prophétique et les exégèses. Le croyant peut trouver dans le premier recueil les
témoignages rapportant les paroles, faits et gestes de Muhammad (Mahomet). Qu’il soient
authentiques ou non, le musulman y trouve un modèle de comportement. Quant aux
exégèses, elles lui fournissent les commentaires nécessaires à la compréhension
d’un texte dont la langue et les référents lui sont devenus inaccessibles.
La situation de l’historien
diffère de celle du croyant en ce qu’elle instaure dès le début un rapport de
distanciation avec l’objet de son étude. Croyant ou non, l’historien essaiera
de réfléchir sur un texte qui date d’une époque et qui a été produit en un lieu
précis.
Combats autour du sens
Quand l’exégèse se penche sur
le Coran, celui-ci est déjà sorti du cadre limité dans lequel il est
apparu : Le Hedjaz et Médine.
La
lecture historique dispose de plusieurs objets d’études
-
un texto clos : le Coran
-
une multiplicité de textes « explicatifs » : les exégèses
- Des documents sur la vie du Prophète : hadiths, maghâzî, Sîra d’Ibn Hicham
- Des documents sur la vie du Prophète : hadiths, maghâzî, Sîra d’Ibn Hicham
- - Une langue ancienne présente:
1.
Dans la poésie
antéislamique
2.
Dans les
dictionnaires médiévaux
-
Des témoignages sur la société tribale
pré-islamique :
-
Ayyâm al-‘Arab
-
Des récits de
voyageurs modernes comme ; Ch. Doughty, Thesiger, Lawrence, Jaussen…
Si le Coran n’a cessé de
susciter la production d’exégèses, de
gloses, de Commentaires et de
traductions, les lectures proprement
historiques le concernant sont pratiquement inexistantes. Pourquoi?
Questions à propos de la lecture historique
· Qu’appelle-t-on
lecture historique ?
À quel genre
de lectures s’oppose la lecture historique ?
·
·Quelles sont les autres lectures possibles ?
·
· Qui est capable/
habilité de faire une lecture historique ?
·
· Une lecture
historique est-elle définitive ?
Est-elle remise constamment en question ?
Quels sont les résultats visés par la lecture historique ?
·
·
Dans quelles
conditions ses résultats peuvent-ils être remis en question ?
·
·
À quels obstacles
se heurte la démarche de l’historien des textes sacrés ?
· Peut-on faire une
lecture historique d’un texte sacré ?
·
Lecture
historique et lecture des représentations.
·
· Véritable entreprise archéologique tendant à mettre à
jour des mentalités enfouies ou des tonnes de gloses, de commentaires tendant volontairement ou non
à effacer le contexte initial.
Lecture historique
et texte sacré: Le cas du Coran et de ses exégèses
La lecture historique est différente de la lecture du
croyant. Elle tient compte de deux données :
le temps et l’espace.
Nécessité de la distanciation :
-
Etude du terrain : ne pas se tromper
d’espace de la langue c’est à dire la
langue des tribus ;
-
de représentations locales : récit de voyageurs
-
des influences : vraisemblable ou non.
-
Problèmes de chronologie : strates plutôt
que classement sourate par sourate
-
mise en contexte
-
vraisemblable ou pas dans un certain
contexte ;
-
le travail a été fait pour la
Bible : Botero et « la
naissance de Dieu »
Les objets d’études : le Coran plus les
exégèses
-
les matériaux : poésie antéislamique,
hadiths, maghâzî, Sîra d’Ibn
Hicham, le Lisân, les récits de
voyageurs
La méthode : questions
-
Qu’est-ce qu’un texte sacré ?
- À qui s’adresse-t-il ?
-
Dans quelles conditions a-t-il été
produit ?
-
Comment a-t-il
été recueilli ?
-
Comment a-t-il
été fixé ?
-
Comment a-t-il
été ordonné ?
-
Quelle est
sa fonction ?
-
Quelle est
la spécificité du Coran en tant que texte sacré par rapport aux autres
écritures sacrées ?
(Il est, par exemple,
différent de la Torah qui est un texte réécrit et
des Évangiles écrits/ dictés par des
apôtres et concernant plutôt les paroles
et gestes du Christ )
-
Objet de croyance, le texte sacré admet-il une
approche historique ?
-
À partir de quelle période s’est-on mis à
l’expliquer ? À le commenter ?
-
premièrement : le Coran des tribus
-
deuxièmement le Coran de l’exégèse ;
-
troisièmement le Coran dans la société
moderne : islamistes, convertis,
sympathisants chrétiens.
Le problème des
traductions : une lecture qui
n’énonce pas son point de vue.
Texte éternel ?
Il existe des documents très anciens (septième/ huitième siècles) non consultables.
Exégèse
L'Exegèse est apparue plus tardivement : le Coran est
déjà sorti non seulement du Hidjaz, mais
de l’Arabie.
Tabarî reprend les
commentaires antérieurs qui doivent dater du milieu du huitième siècle.
-
À quel moment de
l’histoire naît l’exégèse ?
-
Quelles sont les
nécessités historiques de son apparition ?
-
Quelles étapes
a-t-elle traversées ?
-
Y a-t-il
plusieurs exégèses ?
lesquelles ? (Tabari, Razi, Ramakhchari, Ibn Arabi…)
Combats autour du sens :
- Enjeux sociaux et politiques
- Rôle des isnad
- Rôle de certaines figures : Ibn Abbas, ‘Aicha, Compagnons, ‘Ali…
- Les exégèses sunnites, chiites et soufis
Comment procède-t-on ?
- Décontextualisation/ atomisation
- Mythification : figure du prophète + eschatologie
- Mise en parallèle des ikhtilfât
Les lectures perdues : volontairement ou non
Fonction de l’exégèse :
- Répondre aux questions du croyant
- Ne rien laisser dans l’ombre
- Anecdotiser
- Nommer les protagonistes
Plan
Introduction :
Spécificité du Coran
en tant que texte sacré.
Si le Coran a été l’objet
de multiples exégèses, il n’a pas encore
été sérieusement abordé par l’historien.
Une lecture
historique du Coran reste à faire.
Si pour le croyant,
le Coran est un message divin destiné à lui enseigner un comportement, une conduite, des rites pour gagner
l'au-delà,
L’exégète est un
intermédiaire entre le texte sacré et
les croyants. Mais cette entremise n’est pas à l’abri d’enjeux sociaux et
politiques.
L’historien essaye de
se soustraire à l’exigence des croyants, aux injonctions des pouvoirs en
place et surtout à ses convictions
personnelles. C’est une tâche titanesque
qui permet le comprendre la rareté de travaux réellement historiques.
Faut-il s'avouer vaincu ? Abandonner une tâche
impossible à réaliser ? Se contenter des discours des exégètes, des idéologues, des
meneurs de foules et les défenseurs des
pouvoirs de toutes sortes ?
Cependant, l’encouragement
vient du fait qu’il existe des études
historiques pour d’autres croyances comme :
Les travaux sur les
mythes Grecs entrepris par Jean-Pierre
Vernant et son équipe.
Mais on pourrait dire
que cela est plus facile parce que ces mythes
ne sont plus l’objet de
croyances.
Les travaux sur la
Bible.
De toute façon,
l’historien ne se pose pas la question de la légitimité de son travail mais de
la possibilité de l’entreprendre.
Ses questions concernent plutôt :
L’objet de son étude
Les matériaux
disponibles
La méthode à suivre
L’historien
rencontrera forcément sur son chemin
les travaux des exégètes qui se
sont donnés pour objet d’étude le Coran. Quelle doit être son attitude par
rapport à eux ?
Dans ce combat pour
le sens, l’historien et l’exégète sont-ils deux ennemis inconciliables ou bien existe-t-il un terrain commun de
communication ? Le rapport est-il un rapport d’exclusion ou de
complémentarité ?
Entreprendre une
lecture historique d’un texte sacré comme le Coran est une tentative périlleuse
parce que pratiquement inédite. Pourtant il ne manque pas d’ouvrages qui, essentiellement depuis le 19e
siècle, tentent d’aborder le message coranique d’un point de vue
historique. Ainsi Noldeke, Muir,
Weil ont tenté réfléchir au moins sur le problème de chronologie des sourates coraniques.
Mais à l’examen, leurs propositions
s’avèrent sur ce plan très proches des
autorités traditionnelles musulmanes.
Depuis que le Coran
est sorti du Hidjaz puis d’Arabie, il a
été l’objet de commentaires tendant à présenter aux croyants le sens des
versets révélés.
La lecture exégétique
est une lecture à posteriori : Elle
explique un avant par un après, un amont
par un aval. L’idée d’évolution dans les
représentations est totalement écartée,
mis à part le problème des versets abrogeants et abrogés. En cela elle diffère de la lecture des
contemporains de la révélation qui recevaient le message par bribes et pour qui le Coran était «un texte en cours
de production» sur lequel pesait le
risque d’être brusquement interrompu.
Références
Chelhod, Le sacré chez
les Arabes, Paris : G.-P. Maisonneuve et Larose , DL 1965
M. Bucaille, La Bible
le Coran et la science, Pocket, Paris 2011
Hichem Djait, La
grande discorde, Paris, Folio, 2008.
M. Watt, Mahomet à la
Mecque
M. Rodinson, Mahomet,
la fascination de l’islam
Botero, Naissance de Dieu
Thésiger, Le désert
des déserts
Doughty, Arabia Deserta
Lawrence, Les sept
piliers de la sagesse
Jaussen, Les arabes au
pays de Moab
Tor Andrae
Noldeke
Weil
Art. Kur’an E. I.
Conclusion
Si l’historien arrive à :
-
Délimiter d’une part rigoureusement son
territoire
reconstruire un contexte social
-
Rétablir l’ensemble des représentations locales
contemporaines de la révélation
coranique
-
Construire les champs sémantiques et les distributions de sèmes à l’intérieur de ces champs,
Il pourra
-
mieux apprécier ce qu’a pu être la lecture initiale des tribus ;
-
comparer cette lecture avec celle des
exégèses permettant ainsi de comprendre
à quelles préoccupations, à quels impératifs elles répondent ;
-
expliciter les à-priori sur lesquels sont fondées les traductions
successives du Coran ;
Mais il est sûr que
rien est acquis de manière définitive puisque le terrain est fertile en
découvertes :
-
Nouveaux documents
-
Etude plus sérieuse du corpus linguistique
Coranique
Notes, Plan et extraits de la dissertation de Saadane Benbabaali au concours d'Agrégation (année 1991.)
Source principale: les cours d'agrégation de Mme Jacqueline Chabbi, année 1990-91
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